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Marche mondiale des femmes   Marche mondiale des femmes
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World March of Women

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Une femme raconte le calvaire des femmes

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Son appel se résume en une phrase : mettre en branle une réelle volonté politique pour "aboutir à la reconnaissance et au respect des droits des femmes, ainsi qu’à la suppression de toutes les formes de violence à leur égard".

Le 8 mars dernier, l’on célébrait, avec pompe, partout dans le monde, la Journée internationale de la femme. L’occasion, pour les infatigables combattantes et combattants pour le respect des droits de tous les humains, de marquer une pause pour mesurer le chemin parcouru, développer, améliorer ou changer carrément la ou les stratégies de lutte pour l’avènement d’un monde plus juste, plus humain, plus équitable, un monde où les uns et les autres jouiraient des mêmes opportunités pour s’épanouir et participer activement au développement de leurs communauté et pays.

C’était également l’occasion de sensibiliser les populations, l’opinion publique, les dirigeants et décideurs sur la condition et la situation de la femme qui, malgré les progrès réalisés et les acquis, n’a pas beaucoup changé, parce que des millions de petites filles, d’adolescentes, de mères, d’épouses, de femmes âgées sont encore trop souvent victimes, au Sud mais aussi au Nord, de discriminations ou de violences inacceptables.

En effet, si pour plusieurs d’entre nous il est désormais possible de voter, faire des études et mener une carrière autrefois réservée uniquement à la gente masculine, voyager, ouvrir un compte bancaire sans demander au préalable la permission à quelqu’un d’autre, une personne de sexe masculin en l’occurrence, pour plusieurs femmes, il est impossible encore aujourd’hui, au 21e siècle, de faire certaines choses aussi simples que choisir ses amis ou la tenue qu’on va porter, refuser la compagnie de ceux qui ne vous plaisent pas, pour quelque raison que ce soit, boire un verre avec des amis dans un café, donner son opinion sur un sujet, voter librement pour un parti politique de son choix.

Il y a quelques jours, vous avez sans doute lu, avec consternation comme moi, dans un journal de la place, le cas d’une jeune femme battue et répudiée avec ses deux enfants par le cousin de son conjoint et l’ami de ce dernier, tout simplement parce qu’elle avait osé voter pour un parti qui n’était pas celui de ces derniers. Interpellé, le conjoint n’a rien trouvé à redire sauf rappeler à son épouse qu’il lui avait bien dit de ne pas faire la politique, parce que c’est l’affaire des hommes !

Battue, répudiée, humiliée, lâchée par son conjoint parce qu’elle a voulu remplir son devoir de citoyenne en votant, parce qu’elle a commis le délit de vouloir penser par elle-même sans passer par les autres. Cela se passe ici à Ouagadougou. Mais également ailleurs, dans les autres villes et villages du Burkina Faso, en Afrique, en Europe, en Amérique, partout dans le monde où, comme cette dame, beaucoup d’autres femmes sont victimes des violences liées au genre, à leur sexe.

Un chapelet de violences

Elle aurait pu y laisser la vie, comme c’est très souvent le cas ailleurs, parce que ce terrorisme qui ne dit pas son nom cause des dégâts aussi importants que le cancer, le sida. En silence, souvent dans l’intimité des domiciles, mais aussi dans la rue, au marché, au service, à l’école ou dans les amphithéâtres. Tenez. Ici, des lois nous discriminent ouvertement et l’Etat reste passif devant la tradition qui nous écarte de l’héritage, fixe des limites pour nous et punit celles qui osent la questionner ; là, on nous charcute ou nous coud, au nom de la religion ou de cette même tradition ; on nous met des ceintures de chasteté ou contrôle notre virginité ; nous oblige à adopter des canons de beauté qu’ils ont choisis au péril de notre santé ; nous enferme dans des harems ou dans des foyers contre notre volonté ; nous viole, nous impose des relations sexuelles ou des grossesses multiples, rapprochées ; nous achète, nous échange ou nous transmet du mari aux frères ou cousins ; là, on nous défigure à l’acide, nous abat ou nous brûle parce que nous avons mis un terme à une relation destructrice ou qui ne nous plaisait plus ; nous marie à quatre ans, nous égorge, nous poignarde pour sauver l’honneur de la famille parce qu’on nous a aperçue avec un homme qui n’est pas de notre famille ; nous harcèle sexuellement et psychologiquement ; nous insulte, nous prostitue ; nous brûle vives lorsque nous vieillissons en nous taxant de sorcières ; nous assimile au symbole du Mal dans des religions misogynes ; nous ensevelit vivantes sous des tchadors, burkas ou autres tchadris en synthétique sous des températures de plus de 45% à l’ombre parce que notre conjoint doit être le seul à contempler notre corps ; nous lapide parce que nous avons décidé de refaire notre vie après un divorce ou après avoir été abandonnée avec enfants par notre conjoint. Là-bas encore, nous n’avons pas le droit de voir le jour si jamais on découvre, grâce à la magie de l’échographie, que nous sommes de sexe féminin... Je pourrais continuer à égrener le chapelet des violences que nous, les femmes, subissons à longueur de vie, parce qu’il est infini.

Partout, les violences exercées sur les femmes par un partenaire de sexe masculin - le père, le frère, l’époux, le conjoint, le concubin ou petit ami, des collègues, etc.-, ou des institutions comme l’Etat, l’école, la société, atteignent des dimensions hallucinantes et constituent l’une des premières causes d’invalidité et de mortalité chez la femme. Partout, le terrain est "miné". A toutes les étapes de la vie d’une femme !

Même certains acquis arrachés au prix de luttes acharnées et de sacrifices sont aujourd’hui menacés et remis en question. Face à un tel constat, particulièrement inquiétant, il est clair que beaucoup reste à faire pour que les femmes soient considérées comme des êtres humains à part entière, des citoyennes à part entière avec des devoirs mais aussi des droits, parce qu’elles le sont avant d’être des mères, des épouses, des sœurs, des amantes. Enormément des choses restent encore à faire pour que les femmes, ces travailleuses infatigables sur qui reposent énormément des choses dont l’économie, la sécurité alimentaire, la stabilité des sociétés, puissent effectivement s’exprimer, donner leur avis sur tout ce qui les concerne directement, participer activement à la gestion des affaires de leur communauté, à la conception, l’élaboration, l’implémentation, le suivi et l’évaluation des programmes de développement, bref, au processus de développement durable de leur pays.

"Il ne suffit pas de signer des Conventions"

C’est une tâche difficile qui requiert du temps, de la patience et des moyens pour briser définitivement les résistances de ceux qui sont encore férocement accrochés à leurs convictions, aux idées reçues et autres préjugés. Mais c’est une tâche qui requiert surtout l’adhésion de tous et chacun de nous. Une tâche qui nous interpelle parce qu’il s’agit des droits de plus de la moitié de l’humanité, des droits des femmes et dont la violation est une violation des droits humains.

C’est aussi une tâche à laquelle nous ne pouvons nous dérober parce que les conséquences démographiques, sociales, économiques de ces actes qui n’honorent pas l’Homme, sont souvent terribles pour celles qui en sont victimes - traumatisme, transgression des principes et droits fondamentaux au travail, des droits de la personne, mais aussi pour leurs familles, leur communauté, leur pays, bref, le monde entier - perte de la population, diminution de l’espérance de vie à cause des nombreuses grossesses, rapprochées, précoces, surcharge de travail, transgression de la justice sociale, ralentissement de la croissance économique, fonctionnement pas optimal des entreprises et des marchés du travail, bref, aggravation de l’extrême pauvreté. Nous sommes à l’heure de la mondialisation, où un acte posé localement peut avoir des conséquences redoutables au niveau global.

Presque tous les Etats du monde ont pris conscience des multiples formes de violences faites aux femmes, et ont signé et ratifié la Convention pour l’éradication de toutes les formes de violence contre la femme et, au niveau national, ont élaboré des politiques et plans d’actions nationaux et programmes pour sa mise en œuvre.

Mais, malgré cette volonté politique manifeste, et aussi parfois pour des raisons qui échappent souvent à notre entendement, ces outils ne sont pas opérationnels, ou du moins pas assez. Il ne suffit pas de signer des Conventions pour ne pas être mal vu par la communauté internationale, ou parce que celles-ci sont une opportunité pour bénéficier de fonds. Il s’agit de traduire cette volonté par des actions concrètes, de façon transversale (à tous les niveaux de la société), du sommet à la base, partout, sur le terrain, avec les populations.

Il faut un cadre légal adéquat, des lois appropriées qui protègent la femme contre les abus et promeuvent ses droits, une fermeté pour les faire appliquer, des mesures radicales et des sanctions pour punir ceux qui enfreignent ces lois, et même des tribunaux pour les juger, comme le réclament les organisations féministes qui considèrent ces actes comme des crimes contre l’humanité. Mais il faut surtout prévenir.

Par le renforcement des capacités, l’éducation des hommes et des femmes, victimes et bourreaux, qui, consciemment ou inconsciemment, perpétuent ces actes et comportements assassins, de génération en génération, parce que otages d’un système patriarcal qui proclame et perpétue l’idée de « l’infériorité naturelle » des femmes, et d’une « suprématie biologique » des hommes. L’éducation est plus susceptible de modifier les normes sociales, les attitudes, les stéréotypes, etc., pour aboutir à la reconnaissance et au respect des droits des femmes, ainsi qu’à la suppression de toutes les formes de violence à leur égard.

Sans réelle volonté politique, le combat contre la violence de genre, qui n’est autre que le reflet des relations de pouvoir inégales entre l’homme et la femme, sera difficilement gagné. Et il convient de préciser que toute initiative doit être transformationnelle. En effet, il est bon de donner du poisson à manger à ceux qui ont faim. Mais il est préférable de leur apprendre à pêcher et d’apporter l’appui institutionnel au secteur de la pêche parce que là, on apporte ainsi une réponse structurelle au problème de la faim, c’est-à-dire une solution durable au problème.

 

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Last modified 2006-05-08 11:56 AM