Document d’information sur la revendication V-6
Document d'information sur la revendication V-6
de la Marche mondiale des femmes en l'an 2000
concernant le trafic sexuel des femmes et des fillettes
La revendication V-6 de la Marche mondiale des femmes portant sur le trafic sexuel a été adoptée à l'unanimité en octobre 1998, lors de la première rencontre internationale préparatoire de la Marche, par 140 déléguées issues de 65 pays. Cette revendication fait partie intégrante de la plate-forme de la Marche et nous nous sommes engagées à la faire cheminer. Nous savons cependant que certains groupes contestent l'utilisation de la Convention de 1949 comme stratégie pour contrer le trafic et l'exploitation sexuelle des femmes. En produisant ce document, nous souhaitons apporter un complément d'information au Cahier de revendications mondiales de la Marche produit en juin 1999 et contribuer à la réflexion concernant ces questions en plaçant la revendication V-6 de la Marche dans le contexte politique actuel.
Dans un premier temps, vous trouverez le libellé des revendications mondiales touchant les questions du trafic sexuel et de l'exploitation de la prostitution et les textes de l'ONU auxquels référent notre revendication i.e. un extrait de la Convention de 1949 ainsi que les deux résolutions de l'assemblée générale des Nations Unies traitant de la question du trafic. Par la suite, nous vous présentons diverses questions soulevées par la stratégie d'utilisation de la Convention 1949 pour contrer le trafic sexuel des femmes et des fillettes et, plus largement, les courants de pensée concernant la lutte contre l'exploitation sexuelle des femmes.
1. CONTENU DE LA REVENDICATION V-6, DE LA CONVENTION DE 1949 ET DES DEUX RÉSOLUTIONS DE L'ONU
La revendication V-6 de la Marche est formulée ainsi :
« Que la Convention de 1949 pour la répression et l'abolition de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui soit assortie d'un mécanisme d'application qui tienne compte des documents récents dont les deux résolutions de l'assemblée générale de l'ONU (1996) concernant le trafic des femmes et des fillettes et la violence à l'égard des femmes migrantes. »
De plus, la plate-forme de la Marche comprend deux autres revendications qui font directement ou indirectement référence au trafic des femmes et l'exploitation de la prostitution de ces dernieres :
La revendication V-3 exige des États qu'ils mettent en œuvre des plans d'action visant entre autres « la lutte contre la pornographie, le proxénétisme et les agressions sexuelles, dont les viols contre les enfants »; et
La revendication V-4 exige « que tous les États ratifient sans réserve et appliquent les conventions et les pactes relatifs aux droits des femmes et des enfants, notamment : (…) la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ». Or l'article 6 de cette convention, plus connu sous l'acronyme anglais CEDAW, exige « que les États parties prennent toutes les mesures appropriées, y compris législative, pour supprimer, sous toutes leurs formes, le trafic des femmes et l'exploitation de la prostitution des femmes ».
Avec ces revendications, la Marche mondiale des femmes prend donc partie contre le trafic sexuel des femmes et des fillettes ainsi que contre l'exploitation de la prostitution d'autrui. Il est à noter que nous savons que la prostitution et le trafic des personnes n'affectent pas uniquement les femmes. Cependant, ces dernières constituent la principale cible de l'industrie du sexe. C'est pourquoi nous nous concentrons ici sur les femmes et les fillettes.
Que dit la Convention de 1949?
La Convention porte essentiellement sur le trafic des femmes et des enfants pour fins de prostitution. La prostitution y est définie comme étant «incompatible avec la dignité et la valeur de la personne humaine», avec ou sans le consentement des personnes prostituées.
Elle préconise la criminalisation de tous ceux qui profitent de la prostitution d'une autre personne (proxénètes et clients); la prévention via les programmes et services d'éducation, de santé et d'autres services sociaux et économiques; et la «réhabilitation» dans la société des femmes prostituées. Elle préconise aussi l'élimination de toute forme de légalisation de la prostitution.
Article 1
Les Parties à la présente Convention conviennent de punir toute personne qui, pour satisfaire les passions d'autrui :
1) Embauche, entraîne ou détourne en vue de la prostitution une autre personne, même consentante;
2) Exploite la prostitution d'une autre personne, même consentante.
Article 2
Les Parties à la présente Convention conviennent également de punir toute personne qui :
1) Tient, dirige ou, sciemment, finance ou contribue à financer une maison de prostitution;
2) Donne ou prend sciemment en location, en tout ou en partie, un immeuble ou un autre lieu aux fins de la prostitution d'autrui
Les autres articles de la Convention décrivent pour la plupart les modalités de collaboration entre les diverses autorités étatiques (des pays d'origine et de destination).
Que disent les deux résolutions de l'assemblée générale de l'ONU mentionnées dans la revendication V-6?
Ces résolutions contiennent un portrait plus complet et contemporain du phénomène du trafic sexuel et de la prostitution que celui de la Convention de 1949. Dans ces résolutions, on trouve diverses solutions aux violations des droits humains des femmes qui sont commises à plusieurs niveaux, par les individus, les trafiquants et les autorités étatiques.
La résolution concernant le trafic des femmes et des enfants (A/RES/51/66) propose des mesures pour s'attaquer aux racines du phénomène et des mesures concrètes pour venir en aide aux femmes trafiquées. Elle préconise que des ressources soient allouées aux ONGs travaillant auprès des femmes trafiquées pour leur assurer la disponibilité de services tels que l'hébergement, l'aide juridique, l'aide psychologique, la formation et l'accès à l'emploi, le retour et la réintégration dans leurs pays d'origine, etc. On y propose aussi la formation pour les forces policières et autres agents (immigration) afin de les sensibiliser aux réalités du trafic sexuel et d'assurer un meilleur traitement pour les victimes du trafic. Enfin, la résolution demande la criminalisation de toute forme de trafic des femmes et des enfants, et propose la répression envers les trafiquants par des moyens criminels ou civils tout en excluant la répression envers les femmes trafiquées.
La résolution sur les travailleuses migrantes (A/RES/51/65) propose des solutions aux problèmes de l'exploitation sexuelle et de la violence subi par les travailleuses migrantes (par exemple, les femmes qui travaillent comme aides domestiques dans des pays étrangers) aux mains de leurs employeurs ou des trafiquants. Elle décrit des moyens pour protéger les droits humains des travailleuses migrantes, incluant des services accessibles en matières de santé, aide juridique, et autres services sociaux. Elle propose aux États d'échanger de l'information sur les problèmes souvent encourus par les travailleuses migrantes, afin de trouver des moyens de prévenir les abus.
La Convention de 1949 est-elle désuète?
Le langage de la Convention paraît un peu archaïque et peut porter à confusion. L'emploi du terme « dignité et valeur de la personne » peut nous laisser croire que les femmes prostituées sont indignes. Mais ce n'est pas là le sens de la phrase. En fait, ce terme vient de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, et il est employé dans plusieurs instruments internationaux pour la protection des droits humains, tels que la CEDAW. Dans ces documents, le terme est utilisé pour affirmer que tous les êtres humains sont égaux dans la dignité et qu'ils ont des droits inaliénables tels que l'intégrité, la sécurité, etc.
La Convention de 1949 exige que ceux qui exploitent la prostitution d'autrui (trafiquant et proxénètes) soient punis par des mesures criminelles ou civiles. Par contre, les femmes prostituées ou trafiquées ne doivent pas être criminalisées. Cette position est la suite logique de l'analyse de la prostitution comme étant une des formes d'exploitation sexuelle des femmes. Même si l'approche judiciaire ou juridique est souvent semée de difficultés pour les femmes (car des gouvernements pourraient l'utiliser pour criminaliser les femmes trafiquées), nous croyons qu'il est préférable d'avoir une convention internationale dénonçant clairement l'exploitation de la prostitution d'autrui et d'agir fermement au niveau national pour contrer les utilisations néfastes des gouvernements. Se priver d'un outil international nous semble encore plus dommageable à long terme pour les femmes.
Une autre des critiques que l'on fait à la Convention de 1949 c'est qu'elle n'est pas assortie d'un mécanisme de surveillance. Notre revendication propose justement un mécanisme d'application (par exemple, un protocole facultatif) qui tient compte des documents plus récents, tels que les deux résolutions citées plus haut.
Certains groupes contestant notre revendication (voir plus loin) affirment aussi que la Convention ne reflète pas les valeurs ni le contexte contemporain où il existe plusieurs formes de trafic, qui ne sont pas toujours liées à la prostitution ni à l'exploitation sexuelle. Les deux résolutions citées plus haut, situent clairement notre revendication dans l'optique de protection des droits humains de toutes les femmes trafiquées et aborde l'importance de mettre à jour la compréhension du dossier des travailleuses et travailleurs migrants et des abus de droits perpétrés.
Les opposants à la Convention de 1949 soulignent également que peu de pays ont ratifié cette convention (seulement 69). Il est vrai que l'industrie du sexe est très rentable, non seulement pour les trafiquants mais aussi pour les états. C'est probablement ce qui explique ce manque d'enthousiasme. Toutefois, la mise sur pied d'un comité de travail, comme ceux attachés à d'autres instruments internationaux telle la CEDAW, pourrait amener plus de pays à signer cette Convention. L'ajout de protocoles ayant pour but de rendre la Convention plus conforme avec la réalité contemporaine du trafic des personnes et la volonté de protéger les droits des personnes trafiquées pourrait aussi contribuer à améliorer cet outil et ainsi attirer un appui plus large de la communauté internationale.
Pourquoi insister sur la Convention de 1949?
La première conférence mondiale sur les femmes, tenue pendant l'année internationale de la femme à Mexico en 1975, a demandé aux gouvernements de prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la traite des femmes et à la prostitution. Elle a été suivi en 1978 par la demande adressée au Secrétaire Général de l'ONU de la part de la Commission de la condition de la femme de préparer un rapport sur l'application de la Convention de 1949 et en 1980 par la Conférence mondiale de la Décennie des Nations Unies pour la femme de Copenhague, qui a invité les gouvernements à ratifier la Convention et à soumettre au Secrétaire général des rapports concernant la manière dont ils ont appliqué les dispositions. Ces conférences ont été suivies par plusieurs rapports et conférences ainsi que l'émergence de la controverse qui persiste aujourd'hui autour du concept de «prostitution forcée». La Convention de 1949 ne reçoit pas de nouveaux appuis depuis quelques années.
Cependant, ces dernières années, l'exploitation de la prostitution des femmes et des enfants est devenue une des industries les plus florissantes à l'échelle mondiale, générant des revenus estimés à plus de 52 $ milliards par année. Le trafic des femmes et des enfants à des fins d'exploitation sexuelle a pris des proportions alarmantes. On estime qu'environ 4 millions de personnes sont trafiquées chaque année et que près d'un million d'enfants sont enrôlés dans l'industrie du sexe tous les ans. De plus, l'âge moyen d'entrée dans la prostitution est actuellement de 14 ans, ce qui signifie qu'il y a des enfants aussi jeune que huit ans qui se retrouvent dans cette industrie. Certains évaluent à au moins neuf million le nombre de femmes prostituées dans le monde, mais d'autres estiment que ce nombre est plus près de 40 million. Cette réalité incontournable pose de nouveaux défis aux États et aux mouvements des femmes et de défense des droits humains.
Dans ce contexte, l'importance de la Convention de 1949 réside dans le fait que c'est le seul instrument international ayant force de loi (pour les pays signataires) où la prostitution est définie comme une violation des droits fondamentaux de la personne.
De plus, cette convention est le seul instrument reconnaissant que le consentement ne peut être utilisé comme défense de la part des proxénètes et trafiquants lors d'accusations criminelles venant des femmes victimes de l'industrie du sexe. Il s'agit là d'un enjeu de taille. Si on introduit le concept de trafic «forcé» comme cela semble être le cas dans la nouvelle convention sur le crime transnational présentement à l'étude (et plus précisément dans le protocole visant à prévenir, réprimer et punir le trafic des personnes, en particulier des femmes et des enfants), la porte s'ouvrira à la notion de consentement. Les proxénètes et trafiquants auraient alors la défense parfaite lors d'accusations criminelles venant des femmes trafiquées. Ce serait très difficile pour elles, la majorité étant sans ressources et sans appui, de prouver qu'elles étaient forcées.
En juillet 1999, suite à la consultation des ONGs du Groupe de travail sur les formes contemporaines de l'esclavage, la Sous Commission des Droits de l'Homme de l'ONU a recommandé, entre autres, que « les gouvernements qui ne l'ont pas encore fait ratifient la Convention de 1949 ». En février 2000, la Rapporteuse spéciale chargée de la question de la violence envers les femmes a fortement critiqué la convention de 1949 sans appeler a son rejet. Ces deux positions illustrent bien qu'il est nécessaire de poursuivre le débat. Voilà ce a quoi la Marche mondiale des femmes contribue.
2. Deux grands courants
La réponse au problème de l'exploitation sexuelle croissante des femmes et des enfants dans le monde n'est pas simple. Les stratégies proposées sont loin de faire l'unanimité et soulèvent des passions dans divers milieux, selon les perspectives idéologiques des acteurs et leurs intérêts. Le mouvement des femmes, avec sa diversité culturelle, sociale et politique n'y échappe pas. C'est ce qui explique la contestation actuelle de notre revendication V-6, liée à la Convention de 1949.
Comme plusieurs d'entre vous le savent, la revendication V-6 concernant la Convention de 1949 fait actuellement l'objet d'une campagne de contestation lancée par la Global Alliance Against Trafficking in Women (GAATW). Ce groupe a envoyé (en mars 2000) une lettre à plusieurs groupes participants de la Marche leur demandant de retirer leur appui à cette revendication de la Marche.
Selon la GAATW, la Convention de 1949 n'est pas un bon instrument pour s'attaquer au trafic des femmes et des enfants pour plusieurs raisons, entre autres :
Des états signataires ont utilisé cette Convention pour punir et criminaliser les femmes dans la prostitution;
La Convention de 1949 est désuète et ne reflète pas la réalité contemporaine du trafic, et ne peut être employée efficacement;
La qualification de la prostitution comme étant un « mal» ne reflète pas les valeurs d'aujourd'hui et le fait que pour beaucoup de femmes la prostitution est une alternative viable à la pauvreté;
La Convention vise la criminalisation des proxénètes, alors que les femmes dans la prostitution ont besoin de ces personnes pour assurer leur protection.
Plusieurs organismes et individus sont regroupés sous l'appellation du GAATW. Le GAATW a des membres dans plusieurs pays, dont le Canada, les États-Unis, la Thaïlande et les Philippines. De plus, divers organismes tels le GAATW, le Network of Sex Work Projects, et la Foundation Against Trafficking in Women (ou STV, Pays Bas) sont regroupés sous un organisme parapluie portant le nom de International Human Rights Law Group (IHRLG). Le GAATW et le « Network» ont des groupes membres qui travaillent directement auprès des personnes prostituées.
Ces groupes croient que la répression de la prostitution n'a rien donné, et qu'il faut donc pousser pour la légalisation et la réglementation de l'industrie du sexe. Ils ne voient rien de problématique dans le commerce sexuel, seule la coercition, ou la « prostitution forcée », pose problème à leurs yeux. Ils pensent que la priorité d'action est d'éliminer la stigmatisation des personnes prostituées en les considérant comme des «travailleuses du sexe». Cette stratégie permettrait, selon eux, de protéger davantage les droits humains des personnes prostituées contre les abus commis par les trafiquants et les autorités étatiques et policières. Ils s'opposent fermement à la Convention de 1949 et travaillent activement à l'élaboration du protocole sur la prévention du trafic des femmes pour la nouvelle Convention de l'ONU qui porte sur le crime organisé à l'échelle internationale, dont nous avons déjà parlé.
Un autre courant comprend des groupes membres ou alliés à la Coalition Against Trafficking in Women (CATW) qui forme un groupe de pression avec des membres dans plusieurs pays : les États-Unis, le Canada, certains pays de l'Amérique du sud et de l'Afrique, la France, la Norvège, les Philippines, la Thaïlande, l'Australie, l'Inde et le Bangladesh. Des individus et des groupes (plusieurs travaillant auprès des femmes trafiquées) en sont membres.
La CATW préconise l'amélioration de la Convention de 1949 sur le trafic et l'exploitation de la prostitution d'autrui par l'ajout de protocoles et d'un comité (mécanismes de surveillance et de plaintes). Ces groupes croient que cette Convention est le seul instrument qui reconnaît le phénomène de la prostitution comme étant un abus des droits humains des femmes et que c'est là un acquis important pour les femmes. Ils situent le débat sur la prostitution et le trafic dans une perspective d'exploitation sexuelle des femmes, qu'elles soient ou non consentantes. Les tenants de cette tendance croient que la normalisation et la réglementation de l'industrie du sexe ne résoudront pas le problème de la stigmatisation des femmes, et qu'au contraire, cette industrie sera renforcée et les femmes seront plus contrôlées que jamais. Ils prônent comme alternative de lutter contre la criminalisation des femmes prostituées et pour une gamme complète de services spécialisés ou spécifiquement adaptés, sans pour autant banaliser la prostitution, ni la réduire à une simple activité économique. Ces groupes proposent aussi la criminalisation accrue des proxénètes et des clients.
Récemment, la CATW a fondé, avec d'autres groupes de femmes comme NOW et Equality Now (États-Unis) et le Lobby européen des femmes, une coalition, le Réseau international des droits humains, pour intervenir dans les travaux de rédaction du protocole à la nouvelle convention onusienne contre la criminalité transnationale organisée.
CONCLUSION
Est-ce qu'il y a des convergences?
Malgré les divergences évidentes concernant la meilleure stratégie à adopter pour assurer le respect des droits fondamentaux des personnes trafiquées et prostituées, nous croyons qu'il existe des consensus sur les mesures que les États doivent prendre à court terme pour améliorer la situation des personnes prostituées et victimes du trafic :
offrir de l'aide financière et juridique ainsi que de l'hébergement;
garantir le droit aux services sociaux et au logement dans le pays d'accueil;
assurer la protection lors des procédures criminelles contre les trafiquants, etc.
ne pas criminaliser les personnes prostituées et trafiquées;
assurer leur droit de s'associer;
mettre en place des programmes de prévention dans les pays où les femmes sont particulièrement vulnérables aux trafiquants, incluant la sensibilisation du public aux réalités du trafic sexuel.
La Marche mondiale des femmes, en réclamant l'application de la Convention de 1949 s'inscrit dans un courant de pensée extrêmement critique envers tous ceux qui profitent de la pauvreté et de la vulnérabilité des femmes. Nous savons que ce ne sont pas tous les groupes participant à la Marche qui ont des positions tranchées sur la prostitution comme forme d'exploitation sexuelle des femmes. C'est pourquoi une réflexion s'impose dans l'ensemble des groupes de femmes. Plusieurs l'ont entreprise et elle se poursuivra certainement durant bien des années encore.
Une chose est certaine : quelle que soit notre position sur la prostitution, nous ne pouvons négliger le fait que ce débat s'effectue dans le contexte d'une augmentation effarante du tourisme sexuel et du trafic des femmes et des fillettes. La mondialisation, c'est aussi cela. L'appauvrissement des populations et, plus particulièrement, des femmes, de même que l'introduction de rapports marchands dans toutes les sphères de l'activité humaine, conduisent à des systèmes d'exploitation que nous ne devons pas sous-estimer. De plus, la persistance d'idées patriarcales sur la place et les droits des femmes entraîne des inégalités criantes au plan des rapports privés entre les hommes et les femmes, y inclus dans le domaine des rapports sexuels. Les féministes doivent tenir compte de ce contexte dans les discussions entourant la prostitution et le trafic sexuel, quelles que soient les stratégies qu'elles retiendront pour que toutes les femmes jouissent de tous leurs droits fondamentaux.
Dans ce sens, le Comité de coordination de la Marche mondiale des femmes en l'an 2000 considère que le débat social entourant toute cette question complexe est sain et qu'il doit se poursuivre dans tous les milieux, à la recherche de solutions adéquates à long terme pour mettre fin à l'exploitation sexuelle des femmes.
Le comité de coordination de la Marche mondiale des femmes
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Last modified 2006-05-18 04:51 PM
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