Passons à l'action, 2 mars 1999
Qu'est-ce que cette Convention ?
La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes a été adoptée en 1979, il y a exactement 20 ans ! Elle est entrée en vigueur en 1981. A ce jour, 160 États l'ont ratifiée. Et des pressions s'exercent à l'échelle internationale pour que la totalité des États membres de l'ONU l'aient ratifiée d'ici l'an 2000. Elle est le seul instrument international visant spécifiquement les femmes. D'où son importance majeure pour le mouvement des femmes à travers le monde.
Cette Convention vise non seulement la reconnaissance mais l'exercice de l'égalité des femmes. L'article 1 énonce le droit à l'égalité et l'interdiction de toute forme de discrimination qui a pour effet de compromettre la reconnaissance, la jouissance et l'exercice par les femmes, quel que soit leur statut matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme, des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine. Et l'article 2 condamne la discrimination à l'égard des femmes, sous toutes ses formes.
La Convention énonce également un ensemble de dispositions telles : droit aux bénéfices du progrès et du développement ; à la protection de la maternité ; élimination des préjugés ; reconnaissance des responsabilités des hommes et des femmes à l'égard du soin et de l'éducation des enfants ; suppression du trafic des femmes et de l'exploitation de la prostitution des femmes ; droit à la participation à la vie politique et publique du pays ; droits égaux en ce qui concerne l'acquisition, le changement et la conservation de la nationalité ; droits égaux à l'éducation; droit au travail, à l'égalité de rémunération, à la sécurité sociale, à la santé et à la sécurité du travail et contre toute discrimination fondée sur le mariage et la maternité (ex : droit au retrait préventif) ; droit aux services de santé ; droit aux prestations familiales ; accès à la propriété, au crédit ; droit de participation aux sports, aux activités récréatives, à la vie culturelle ; reconnaissance de la participation des femmes à l'économie (dont leur travail non rémunéré) ; droit de participer au développement ; droits à des conditions de vie convenables ; accès à la justice ; droit à la libre circulation ; droit au mariage librement consenti, à la maternité librement choisie.
Pourquoi un protocole ?
Quand un État ratifie une Convention, il s'engage à adopter des lois et à prendre des mesures pour faire respecter les droits proclamés dans la Convention, les mettre en oeuvre, les exercer. Mais cela n'est pas suffisant, car les États même signataires, ne respectent pas toujours la Convention. C'est le cas de la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes. D'où la nécessité d'un protocole pour permettre aux individus et aux groupes de porter plainte contre les États qui violent la Convention. Un protocole constituerait un instrument précieux entre les mains des femmes et des groupes de femmes pour exercer une vigilance et une pression constantes pour forcer les États à mettre en œuvre les droits énoncés dans la Convention.
C'est pourquoi la Marche mondiale des femmes en l'an 2000 en a fait une de ses revendications principales.
Des pressions à faire maintenant !
Mais c'est maintenant que se déroulent les travaux concernant le protocole facultatif de la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes. Les négociations commencent en effet le 1er mars et se poursuivront jusqu'au 12 mars à la Commission du Statut de la femme de l'ONU
Nous invitons tous les groupes participants à la Marche mondiale des femmes en l'an 2000 à faire des pressions politiques auprès de leur gouvernement pour exiger l'obtention d'un protocole facultatif et ce, pour les raisons suivantes :
- le développement d'une jurisprudence spécifique aux femmes. La Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes est la seule Convention qui concerne spécifiquement les femmes. La mise en place d'un mécanisme de plainte plus particulièrement désigné au traitement de plaintes faites par des femmes permettra le développement d'une jurisprudence spécifique aux femmes et qui correspond davantage aux véritables conditions des femmes. Il y a là urgence étant donnée l'absence d'approche de genre dans les autres instruments internationaux où les droits humains des femmes semblent y être faiblement compris et tout aussi faiblement intégrés.
- l'augmentation de la crédibilité de la Convention. Le rattachement d'un protocole facultatif permettrait certainement de relever le profil de la Convention et d'en augmenter la crédibilité parmi les traités de droits humains. C'est là aussi un besoin urgent car les droits humains des femmes ne jouissent pas de la même attention ni du même statut.
- une plus grande facilité pour les femmes dans l'exercice de leurs droits. Les chances sont plus grandes en effet pour qu'un protocole soit davantage connu des femmes fournissant ainsi une voie plus rapide de règlement.
Quoi exiger des gouvernements ?
Nous invitons tous les groupes participants à la Marche mondiale des femmes en l'an 2000 à exiger de leur gouvernement qu'ils appuient les points suivants :
Concernant le droit de porter plainte
Il est essentiel, si on veut que le protocole soit efficace, que des ONG puissent loger des plaintes au nom de femmes individuelles ou de groupes de femmes. En effet, si seules les femmes elles-mêmes victimes de violations peuvent porter plainte en vertu du protocole, alors ce protocole ne pourra constituer un recours pratique et efficace pour les femmes les plus vulnérables et les plus démunies.
Le protocole doit aussi permettre au Comité d'accepter des plaintes pour le compte de femmes non identifiées. Il existe en effet suffisamment de cas où la loi ou la coutume sont à l'évidence discriminatoires sans qu'il soit nécessaire d'identifier nommément une plaignante pour qu'un État puisse comprendre les motifs particuliers de la plainte et y donner suite.
Enfin, le fait d'exiger l'identification de la plaignante peut être extrêmement dangereux dans certains pays.
Concernant les réserves
Le protocole ne doit permettre aucun droit de réserve. Ce protocole est déjà facultatif : les États signataires de la Convention conservent en effet le pouvoir de décider s'ils acceptent ou non que des plaintes puissent être logées contre eux. De plus, la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes est celle qui comporte le plus de réserves par les États signataires comparativement à tous les autres traités de droits humains. Le protocole ne doit donc laisser place à aucune réserve.
Concernant la procédure d'enquête
La procédure qui permet au Comité d'initier une enquête sur toute violation systématique de la Convention constitue le cœur du protocole. Pour cette raison, le protocole ne devrait pas accorder aux États signataires le droit d'accepter ou de refuser cette procédure d'enquête.
Concernant les dispositions de la Convention
Le protocole devrait s'appliquer à toutes les dispositions de la Convention et non pas aux seuls droits. En effet, parce qu'il existe différentes interprétations des articles de la Convention, la référence aux seuls "droits" peut s'avérer trop restrictive par rapport à l'ensemble des obligations auxquelles sont tenus de se conformer les États signataires.
Voter si nécessaire...
Nous invitons tous les groupes participants à la Marche mondiale des femmes en l'an 2000 à faire pression sur leur gouvernement respectif pour que ceux-ci ne craignent pas d'aller de l'avant et d'exiger le vote si nécessaire (il semble que la coutume dans ces travaux soit de faire consensus et d'éviter de devoir voter) afin de faire obstacle à l'activité d'une petite poignée de pays déterminés à bloquer tout protocole.
NOUS VOULONS ENTER DANS LE TROISIÈME MILLÉNAIRE AVEC EN MAINS TOUS LES OUTILS POUR ELIMINER TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION ENVERS LES FEMMES.
IL NOUS FAUT UN PROTOCOLE
Last modified 2006-04-12 01:38 PM
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