Déclaration de la Marche Mondiale des Femmes - Journée Internationale des Femmes 2012
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On traverse une crise du système capitaliste, raciste et patriarcal qui impose, pour se supporter, des « mesures d’austérité » terribles qui nous obligent à nous, les peuples, à payer pour une crise que nous n’avons pas provoqué: ces sont des coupures budgétaires de tous les services sociaux, réductions des salaires et des pensions de retraite, encouragement de la guerre et avancée de la commodification de tous les domaines de la vie. Nous, les femmes, nous payons le prix le plus élevé : nous sommes les premières à être licenciées et, en plus des tâches domestiques les plus courantes, nous sommes obligées à assumer les fonctions couvertes auparavant par les services sociaux. Ce type de mesures supportent le poids de l’idéologie patriarcale, capitaliste et raciste et sont l’expression des politiques qui suscitent notre retour à la maison, qui stimulent également le développement de la prostitution et la vente des femmes, la recrudescence de la violence envers les femmes, le trafic et les migrations.
Nous dénonçons l’imposition continue d’accords de libre échange qui essaient de transformer les biens communs tels que la santé, l'éducation et l'eau en marchandises et entraîner ainsi un marché d'exploitation de la main d'œuvre bon marché dans les pays du sud. Nous rejetons la culture de la consommation qui appauvrit les communautés, générant de la dépendance et dévastant les productions locales.
Nous nous solidarisons avec les femmes en lutte de l'Europe, spécialement de la Grèce, mais aussi du Portugal, la Galice, l’État Espagnol, l’Italie et la Macédoine, qui s'organisent pour résister l'offensive néolibérale et rétrograde promue par les institutions financières et politiques et par leurs propres gouvernements, qui sont au service des intérêts des compagnies transnationales. Nous nous solidarisons aussi avec toutes les femmes du sud qui affrontent des famines, des appauvrissements, de l’esclavage au travail et de la violence, mais qui continuent à construire leur résistance.
Nous dénonçons l’avancée de la militarisation partout dans le monde, comme stratégie de contrôle de nos corps, nos vies, nos mouvements et nos territoires, et comme garantie pour le néocolonialisme, pour le nouveau pillage et l’appropriation du capital de ressources naturelles, ainsi que pour entretenir l’enrichissement de l’industrie de l’armement face à la crise. Nous constatons avec crainte la menace du retour du militarisme et l’autoritarisme comme valeurs de la société dans des différents pays du monde, tels que : la Tunisie, la Libye et l’Égypte au Proche-Orient, où les femmes et les peuples sont toujours en lutte contre toute forme de dictature intégriste et pour obtenir une démocratie réelle; en Palestine où les femmes lutte contre le colonialisme et le sionisme ; dans des différents pays africains – tels que le Sénégal, où le gouvernement se sert de la force de l’armée pour des intérêts électoraux, ou le Mali, où les groupes armés terrorisent la population civile avec la lutte pour le contrôle de la région du nord; au Honduras, Mexique, Guatemala et en Colombie, où il existe des processus de ré-militarisation ; et dans des divers pays de l’Asie et l'Océanie, où la présence des soldats militaires des États-Unis est renforcée.
Nous nous solidarisons avec les femmes et les peuples en résistance et en lutte de tous les territoires qui sont en guerre, sous le contrôle militaire ou qui risquent de l'être, ou qui subissent l’impacte néfaste d’une présence militaire étrangère. Malgré tout cela, nous, les femmes, continuons à défendre nos territoires, nos corps et notre terre de l’exploitation des armées régulières et irrégulières, étatiques ou privées.
Nous dénonçons la stratégie conjointe des médias globalisés, qui cherchent à revitaliser les dogmes et les valeurs conservatrices et qui mettent en danger les acquis et les progrès des femmes dans le monde. Les espaces de participation sont clôturés, la protestation est criminalisée et notre droit de décider sur nos corps est miné. Notre autodétermination reproductive est menacée là où on l'avait déjà conquise, comme par exemple dans des divers pays de l’Europe (tels que le Portugal et l'Espagne) et de l'Amérique du Nord, où l’avortement est légalisé, mais où ce droit se voit attaqué dans la pratique par des coupures des budgets publiques qui visent les hôpitaux et les services d’interruption de grossesse. Dans beaucoup d’autres pays de l'Amérique Latine et l’Asie-Océanie, les femmes qui avortent sont toujours criminalisées, tels qu’au Brésil, au Japon et à Vanuatu. Au Mexique, l’avortement est légalisé dans le District Fédéral, mais criminalisé dans le reste du pays. Au Honduras, la pilule du lendemain a été interdite. Au Nicaragua, l’avortement est devenu un délit même dans des situations de risque pour la vie de la mère ou de violation, à partir d'une réforme constitutionnelle. La Russie suit l’exemple, avec la femme du président en tête des campagnes pour interdire l'avortement en toute situation. Des groupes auto-surnommés « pro-vie » défendent en réalité la mort des femmes, nous insultent et insultent les professionnelles de santé de l’Amérique du Nord, font pression sur le parlement pour réviser la loi en Afrique du Sud et empêchent tout débat au Pakistan.
Nous nous solidarisons avec toutes les femmes qui continuent à lutter et à affronter les revers de la police, des services publics et de la justice injuste, ainsi qu’avec celles qui subissent des violences.
Face à ces situations, nous sommes dans les rues, nous avons des alternatives et nous les vivons. Nous réitérons que nous allons continuer à nous renforcer, a partir de nos corps et nos territoires, en résistance et en défense des mêmes, tout en soulignant nos rêves de transformation structurelle de nos vies et en marchant tant que toutes les femmes ne seront pas libres !
Nous lançons un appel à l’articulation de nos mouvements et à l’alliance avec les autres mouvements, puisque c’est la seule forme de construire un monde libre.
Dans le Monde, 8 mars 2012
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