Discours de Françoise David - 2000-06-09
Voici l’allocution que Françoise David, présidente de la Fédération des femmes du Québec et porte-parole de la Marche mondiale des femmes en l’an 2000, a faite au nom des organisations non gouvernementales (ONG) de la région Europe/Amérique du Nord, le vendredi 9 juin 2000, devant la séance plénière clôturant la session extraordinaire de l’Organisation des Nations Unies chargée d’évaluer le Programme d’action adopté à la 4e Conférence mondiale sur les femmes à Beijing en 1995.
Déclaration des ONG de la région Europe, Amérique du Nord
Je viens parler ici au nom des femmes de l’Amérique du Nord, de l’Europe de l’Est et de l’Ouest. Au nom de la diversité des femmes qui habitent notre région : femmes jeunes et âgées, de toutes religions, origines ethniques et milieux sociaux, femmes blanches et de couleur, autochtones, hétérosexuelles et lesbiennes, migrantes, handicapées. Nous sommes fières de cette diversité mais nous sommes conscientes aussi qu’elle est source de discriminations et d’inégalités entre les femmes. C’est donc toutes ensemble que nous sommes décidées à les combattre.
Au terme de ces journées de négociations difficiles et souvent frustrantes, nous exigeons de nos gouvernements et de tous les gouvernements de la planète un engagement indéfectible à mettre en place des mesures concrètes pour qu’advienne l’égalité de toutes les femmes.
Nous exigeons la parité, des mécanismes institutionnels pour assurer le droit des femmes à l’égalité, des ressources financières inscrites aux budgets des gouvernements, des agences spécialisées de l’ONU et des instances régionales pour les groupes qui œuvrent pour la défense des droits des femmes et viennent en aide à celles qui sont en difficulté.
Nous dénonçons la pauvreté grandissante des femmes partout dans notre région et, en particulier, en Europe de l’Est, là où les économies en transition et la libéralisation ont entraîné une chute brutale des conditions de vie des populations. Nous réclamons donc des emplois pour toutes, un filet de sécurité sociale, des salaires permettant de vivre décemment, le soutien des Etats à l’entreprenariat féminin, la protection des lois du travail, un accès plus facile à la syndicalisation et la reconnaissance du travail non rémunéré des femmes.
La pauvreté des femmes, dans un contexte de mondialisation où la vie même devient objet et marchandise, enrichit des multinationales sans scrupules. Par exemple, des milliers de femmes d’Europe de l’Est se voient entraînées dans des réseaux illicites qui leur promettent de faux emplois à l’Ouest. Elles sont exploitées, humiliées, séquestrées sans recours véritables. Nous exigeons donc des Etats des mesures pour mettre fin au trafic des femmes et des fillettes.
Le bruit des armes s’est fait entendre lourdement dans notre région, encore une fois à l’Est. Les femmes se sont retrouvées par milliers sur les routes avec leurs enfants. Elles ont vécu des semaines entières dans la terreur des viols, des coups et des assassinats. Nous, de la région Europe, Amérique du Nord disons : plus jamais la guerre, plus jamais les bombes. Nous disons non aux marchands d’armes qui s’enrichissent au détriment des peuples affamés et meurtris par les guerres.
Nous rappelons aussi à nos Etats que les femmes disposent d’un droit inaliénable à disposer de leur vie, de leur corps, de leur santé sexuelle et reproductive. Nous exigeons que les lois reconnaissent ce droit.
Nous demandons des mesures concrètes, des actions gouvernementales concertées avec les organismes non gouvernementaux, pour mettre fin à toutes les formes de violence faites aux femmes. Il faut dire non une fois pour toutes à ceux qui frappent, harcèlent, violent et tuent des femmes seulement parce qu’elles sont des femmes et qu’ils s’arrogent le droit de décider pour elles, de les posséder comme si elles étaient de simples objets.
Maintenant que la Session extraordinaire des Nations Unies sur les femmes est terminée, maintenant que nous avons pu constater à quel point il est difficile de faire avancer la lutte des femmes pour l’égalité et la liberté, nous voulons vous dire que notre combat ne s’arrêtera pas.
Car il faut plus maintenant que des vœux pieux et des discours. Nous exigeons des actions concrètes, des indicateurs de mesure et des échéanciers. Nous réclamons un autre rendez-vous, en 2005, une cinquième Conférence mondiale sur les femmes. Et nous demanderons des comptes à tous les décideurs de la planète.
Nous sommes décidées à lutter, à nous battre inlassablement pour que soient reconnus les droits de toutes les femmes, partout au monde. L’automne prochain, nous serons des milliers à marcher dans les villes et les villages pour réclamer l’élimination de la pauvreté et des violences faites aux femmes. La Marche mondiale des femmes en l’an 2000 se terminera ici même aux Nations Unies le 17 octobre prochain où nous vous donnons rendez-vous pour construire un monde fondé sur l’égalité entre les sexes, la justice sociale et la redistribution de la richesse.
Françoise David
Présidente
Fédération des femmes du Québec
http://www.ffq.qc.ca
Last modified 2006-03-23 03:08 PM
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