Information sur la politique d’alliances

Ce texte a pour objectif de faire le point sur les processus d´alliance où la Marche est impliquée de sorte à permettre que le temps consacré à la discussion sur la politique d´alliances dans cette Rencontre internationale permette la définition d´orientations du mouvement à ce sujet.

Nous construisons des alliances car il est impossible d´éliminer les causes de la pauvreté et de la violence contre les femmes sans un profond changement politique, économique et social. Ce défi requiert  la mobilisation de beaucoup de mouvements capables de changer la corrélation des forces qui soutiennent l´ordre capitaliste, colonialiste, patriarcal et raciste.

La Marche mondiale des femmes appartient au mouvement féministe et au mouvement alter-mondialiste. Nos actions ont pour objectif de renforcer le mouvement féministe au niveau des analyses, des pratiques et secteurs afin de parvenir à des changements structuraux, à l´égalité de fait et à l´autonomie de l´ensemble des femmes. Nous souhaitons que le féminisme ait voix au niveau de la résistance mondiale contre l´offensive néolibérale, patriarcale et raciste, et dans l´affirmation des alternatives. Notre mission est aussi de réunir les femmes et les mouvements sociaux progressistes.  

D´une part, nous réalisons des alliances stratégiques comme la collaboration à long terme fondée sur une vision commune entraînant un agenda et des stratégies d´action communs. D´autre part, nous effectuons des alliances tactiques. Ce sont, par exemple, les alliances réalisées en fonction de points spécifiques de notre agenda ou d´éléments forts liés à la conjoncture.

Une des craintes se référant à la politique d´alliances est la perte de l´équilibre entre  l´énergie et les ressources nécessaires à notre propre construction et celles destinées à la construction des espaces communs. De même qu´il est commun dans l´expérience des femmes de la base de subir une division sexuelle et sociale du travail, les femmes se trouvent chargées d´une énorme quantité de travail invisible pour maintenir les coalitions, les forums avec des organisations de femmes et d´hommes mais aussi dans les espaces qui réunissent des personnalités féministes.

L´autre crainte concernant ces espaces communs basés sur un consensus est l´absence de prise en considération de questions pertinentes pour nous comme la légalisation de l´avortement, la sexualité et la violence domestique généralement considérés comme des thèmes de la vie privée. Cependant, nous croyons qu´il existe de nouvelles possibilités liées au moment historique que nous vivons : la perception par une grande partie des mouvements sociaux qu´ils ne peuvent pas être isolés et notre propre force et identité en tant que Marche mondiale des femmes.
 

Le Forum social mondial

Le Forum social mondial constitue un espace important pour la construction d´alliances. La Marche mondiale des femmes est, depuis son début en 2000,  un des acteurs du FSM. La Marche a participé à toutes les éditions du FSM et à beaucoup de forums régionaux et nationaux. Nous avons organisé des tables rondes, des séminaires et des actions autour de différents thèmes, selon les différentes éditions du forum, comme l´assemblée des femmes, les camps de la jeunesse, des activités de présentation et/ou  bilan de nos actions mondiales et l´Assemblée des mouvements sociaux. Le prochain Forum social mondial se tiendra à Belém, au Brésil, en janvier 2009.

Nous participons au Conseil international permanent du FSM avec une représentante permanente, qui depuis janvier 2008, est Wilhelmina Trout et une représentante de la coordination nationale où la réunion du conseil du FSM a lieu.  Cette année, a commencé à fonctionner une nouvelle instance du processus du FSM – le groupe de liaison – auquel participent 14 personnes de différentes organisations dont Wilhemina.
En plus du groupe de liaison, nous pourrions trouver des femmes dans d´autres Coordinations nationales qui auraient du temps et seraient disposées à accompagner les commissions de travail thématiques du FSM.

Lors de la dernière rencontre du CI de la MMF, les perceptions concernant le FSM variaient selon les régions : une dynamique plus active sur l´ensemble du continent américain, un intérêt en Afrique mais on évalue que le processus est contrôlé par peu de personnes, de bonnes possibilités d´articulation du mouvement dans le sud-est de l´Asie, un intérêt en Asie du Sud et un épuisement en Europe.

Au début de l´année, nous avons élaboré un document de la Marche pour le débat sur les stratégies du FSM qui se trouve en annexe. Nous proposons que les coordinations nationales discutent ce document à la lumière de leur expérience avec le processus du Forum, en particulier dans sa dimension régionale, et nous donnent un retour concernant leur évaluation.


Les alliances avec les mouvements sociaux

À l´intérieur du FSM nous avons constitué avec d´autres organisations (Via Campesina, CUT, ATTAC, Focus on the Global South, CADTM, etc...) l´Assemblée des mouvements sociaux.

L´ensemble des organisations qui composent l´Assemblée s´est reuni en septembre 2006 à Bruxelles. Nous espérions que ce serait une opportunité pour construire un agenda commun au-delà des FSM. Cependant, nous n´avons pas trouvé d´accord sur la manière de mettre en place un travail commun. La Marche appartient à un groupe de facilitation de l´Assemblée mais, de la même manière que les autres, n´a pris aucune initiative en dehors des FSM.   

Cependant les relations de confiance établies autour de l´Assemblée ont eu une suite de retombées positives notamment dans des actions conjointes contre l´OMC, avec l´invitation de Focus on the Global South pour rejoindre l´initiative Iraq Civil Society, du CADTM (Comité pour l´annulation de la dette du tiers monde) pour l´activité de formation en féminisme et aussi l´agenda commun avec Via campesina autour de la souveraineté alimentaire.

Avec Via Campesina, nous avons déterminé un agenda concret de travail lors du Forum de Nyéléni de souveraineté alimentaire qui s´est passé au Mali en février 2007,  notamment pour sa préparation et son suivi. Lors de ce processus, nous nous sommes rapprochés également de Friends On the Earth International (FOEI). Les objectifs de Nyéléni ont été l´approfondissement de la connaissance collective, le renforcement du dialogue entre les secteurs et groupes intéressés, l´élaboration de stratégies communes et d´un agenda d´actions communes.

Les militantes de la Marche mondiale des femmes qui ont participé à Nyéléni sont venues du Brésil, du Chili, du Pérou, du Mexique, du Québec, de la Galice, de la Turquie, de l´Inde, des Philippines, du Guatemala, des Pays basques, de l´Algérie, de l´Iran, du Burkina Faso et du Mali.

Le comité d´organisation de Nyéléni a été dissolu en août 2008 après avoir rempli sa fonction. Le travail va continuer sur deux fronts : un agenda commun entre les 4 mouvements (MMM, VC, FOEI et WEEP - World Forum Fisherfolk People “Forum mondial des pêcheurs”) et la création d´un centre d´éducation et entraînement à Nyéléni.

Les 4 mouvements vont réaliser leurs assemblées internationales entre octobre et novembre 2008 : la MMF aura la rencontre en Galice du 14 au 20 octobre ; Via Campesina au Mozambique du 17 au 24 octobre ; Amigos da Terra au Honduras du 7 au 15 novembre ; le Forum mondial des pêcheurs aura lieu en Thaïlande du 8 au 18 octobre. Dans chacun de ces événements, on discutera sur les actions de souveraineté alimentaire et les alliances stratégiques. En décembre 208, nous serons en mesure d´évaluer les rencontres et les attentes politiques de chaque mouvement pour définir les prochains pas en commun.


Les alliances avec les organisations féministes

L´alliance avec d´autres organisations de femmes et féministes fait partie de nos préoccupations. Il existe des sympathies issues de positions communes : nous avons déjà eu des dialogues informels, organisé des débats en commun au FSM, appuyé des initiatives et reçu des appuis lors de nos actions mondiales de diverses organisations comme les Women in Black, 1000 femmes pour la paix, le Code Pink, la CATW (Coalition contre le trafic des femmes), la FDIM (Fédération démocratique internationale des femmes). Cependant, nous n´avons pas établi de processus permettant des alliances et des rendez-vous communs sur un plan international, y compris parce que beaucoup d´entre elles n´ont pas de structure de coordination internationale ou de politique définie au niveau des alliances. Avec les Women in Black et la CATW, il existe des relations plus étroites dans des pays de l´Amérique latine, en Europe et en Asie.

En plus de celles-ci, nous savons qu´il existe beaucoup d´autres organisations féministes à caractère international sur lesquelles nous n´avons pas d´évaluation précise. Cependant, nous avons l´impression que la plupart d´entre elles sont institutionnalisées, centrées sur les lobbies, les Nations unies et les organisations multilatérales, étant très éloignées de nos préoccupations et pratiques. À ce titre, on peut considérer le Forum international de l´AWID (l´Association pour le droit de la femme et le développement) qui se réalisera en Afrique du Sud en novembre prochain sur le thème “ Le pouvoir des mouvements ”. Nos camarades d´Afrique du Sud et d´autres groupes locaux ont demandé au bureau local de l´AWID des pratiques féministes pour l´organisation de la conférence avec une transparence financière, l´utilisation de services et produits de groupes locaux pour redistribuer la grande quantité de ressources dépensées dans la région, un lien avec les organisations locales pour la définition des contenus et pour garantir l´accès des femmes pauvres à l´événement, entre autres. Ces revendications sont critiquées par plusieurs branches du mouvement féministe qui considèrent l´expression de ces discordances politiques comme un manque de confraternité (unité entre les femmes).

Pour l´ensemble de ces raisons, nous estimons qu´il est plus intéressant de construire des alliances au niveau régional et à partir de celles-ci discuter avec le Comité international du type d´initiatives que nous pouvons avoir au niveau international.

Les alliances au niveau régional

Dans les régions, la Marche a une série d´alliances établies, beaucoup d´entre elles remplissant la fonction évoquée plus haut. Nous citerons par exemple la participation des WMW Asie dans “  Justice climatique immédiate ! ” ou, dans les Amériques, le travail avec le REMTE (Réseau latino-américain des femmes transformant l´économie), la CLOC (Coordination latino-américaine des organisations paysannes), l´ALAI ( Agence latino-américaine d´informations), la CADA (Campagne antimilitarisation des Amériques), entre autres.

À partir des régions, nous espérons établir des alliances qui sont importantes pour l´affirmation des alternatives, comme celles avec les mouvements des peuples autochtones.  Pour ce faire, il est nécessaire que les régions évaluent les alliances établies, les lacunes et expriment les leçons qu´elles en tirent. Nous suggérons que cela fasse l´objet des prochaines Rencontres régionales de la MMF.

De cette manière, nous pourrons orienter la constitution d´une politique d´alliances stratégiques pour la Marche articulant les différents niveaux (local, national et international) et types d´action (mobilisation, élaboration, éducation populaire, communication, etc.).

Pour parvenir à la définition d´orientations durant la rencontre

Après lecture de ce document et de celui en annexe sur le Forum social mondial, nous vous invitons à réfléchir et si possible parler avec d´autres membres de votre Coordination nationale de sorte à dresser votre bilan et exprimer les défis et possibilités que vous identifiez  concernant :

-    le processus du FSM ;
-    les alliances avec les mouvements sociaux mixtes (où les hommes et les femmes participent) ;
-    les alliances avec les mouvements et organisations de femmes et féministes.